Comment parler d’argent à vos enfants?

13 décembre 2024 par Financière Banque Nationale
Photo d’un parent et de son enfant en train de parler d’argent autour d’une table

Les experts recommandent de commencer tôt, avec des leçons adaptées à chaque tranche d’âge.

Photo d’un parent et de son enfant en train de parler d’argent autour d’une table

Jane Alm a grandi avec une mère célibataire, l’une des premières conseillères en patrimoine d’Edmonton. Dès son jeune âge, elle a appris comment fonctionne l’argent. Sa mère lui a inculqué la valeur du travail acharné, de l’établissement d’un budget, ainsi que la façon d’éviter de s’endetter, parmi d’autres enseignements.

« Elle m’a rendue forte. Elle m’a donné de la résistance », assure Jane Alm, conseillère principale en gestion de patrimoine à la Financière Banque Nationale et membre du groupe consultatif Angus Watt à Edmonton. 

« J’ai appris à toujours distinguer ce dont j’avais réellement besoin de ce que je désirais. »

Aujourd’hui mère de famille, Jane Alm a décidé d’enseigner les mêmes principes à ses enfants. 

Même si les autres parents n’ont pas le même niveau de connaissances financières qu’un conseiller, ils peuvent eux aussi jouer un rôle clé dans l’apprentissage de l’argent par leurs enfants.

Mais où et comment commencer?

Jane Alm affirme que les parents devraient commencer à enseigner la gestion de l’argent à leurs enfants dès qu’ils commencent à parler, en précisant : « Les habitudes sont ainsi ancrées. » Il est important de noter que chaque enfant est différent et qu’il faut donc adopter des approches adaptées à ses capacités et à sa tranche d’âge.

L’un des exercices recommandés par Jane Alm aux parents de jeunes enfants consiste à se rendre dans une épicerie avec 10 $ d’argent de poche et à demander à l’enfant de choisir son fruit, ses céréales et son goûter préférés pour les dépenser. 

Après avoir remis l’argent de poche nécessaire à l’achat de ces articles, le parent peut aider son enfant à déterminer s’il a pris les décisions les plus rentables ou s’il aurait pu dépenser davantage en choisissant des articles moins chers. Ils peuvent également discuter de l’importance de l’épargne.

Jane Alm suggère que chaque fois qu’ils effectuent un achat, ils vous remettent l’argent qu’il reste, afin qu’ils puissent réaliser concrètement que lorsqu’on dépense, l’argent disparaît.

Dans le cas des adolescents, elle recommande de leur donner de l’argent pour leur apprendre à le gérer.

Par exemple, Jane Alm a donné à son fils 200 $ à dépenser en une année scolaire pour l’achat de vêtements. Elle raconte qu’il a tout dépensé en une seule fois pour une paire de chaussures, une paire de jeans et deux chemises. Bien que ces vêtements aient subi une usure notable au milieu de l’année, elle a obligé son fils à les porter jusqu’à la fin de l’année scolaire pour lui apprendre que l’argent est limité.

Elle lui a donné la même somme l’année suivante. Son fils est rentré à la maison avec trois paires de chaussures, quatre paires de jeans et cinq chemises, et il lui restait encore un peu d’argent.

« Il m’a dit : “Tu veux que je te le rende ?” Je lui ai répondu : “Non, garde-le. Tu en auras peut-être besoin plus tard dans l’année” », raconte Jane Alm. 

À la fin de l’année scolaire, il lui restait de l’argent et il m’a demandé : « Tu veux le récupérer ? J’ai répondu : “Non, tu l’as gagné. Tu peux le garder. Tu sais maintenant comment gérer l’argent” ».

La communication est puissante

Une fois que les enfants grandissent, les parents peuvent leur inculquer des concepts plus complexes tels que l’investissement, les dividendes, les gains en capital, où leur montrer leur testament, suggère Jane Alm.

« Nous devons être capables de parler à nos enfants de [ces sujets difficiles], et nos enfants doivent être prêts à nous en parler », estime-t-elle.

Jeet Dhillon, gestionnaire principal de portefeuille chez Gestion de patrimoine TD, à Toronto, recommande également de parler d’argent aux enfants dès leur plus jeune âge.

Les parents peuvent commencer avec une tirelire ou un compte bancaire afin de leur montrer ce que signifie dépenser et économiser de l’argent tout en les familiarisant avec le système bancaire, propose-t-elle.

Ils peuvent également enseigner la discipline à leurs enfants en leur demandant d’effectuer des tâches ménagères ou éventuellement de trouver un emploi pour gagner de l’argent et payer des choses qui ne sont pas nécessaires, ajoute Jeet Dhillon. 

« Surtout dans le monde d’aujourd’hui, où il y a tant de choses disponibles dans les médias sociaux, […] il faut être encore plus discipliné sur ce dont on a réellement besoin et s’assurer qu’il y a un certain équilibre », prévient-elle.

Pour les enfants adultes qui vivent encore à la maison, Jeet Dhillon suggère de les faire contribuer aux dépenses du ménage d’une manière ou d’une autre. S’ils étudient et/ou n’ont pas de revenus, ils peuvent contribuer en aidant à la maison. 

« S’ils vivent à la maison plus longtemps, il ne faut pas que ce soit gratuit, car les enfants peuvent avoir un faux sentiment de sécurité en pensant que la chambre et la pension sont gratuites, que les courses sont gratuites et que maintenant ils peuvent dépenser tout leur argent pour leurs plaisirs », avertit-elle.

Apprenez-leur à établir un budget

Un autre exercice recommandé par Jeet Dhillon, qu’elle a réalisé avec sa fille qui a débuté ses études universitaires cette année, consiste à établir un budget sur une feuille de calcul avec l’enfant et à le revoir régulièrement. Cela les aidera à prendre leurs responsabilités et à mieux comprendre où va leur argent.

« Le transfert de richesse qui va s’opérer vers la prochaine génération est assez alarmant en termes de chiffres, constate l’experte. Il faut s’assurer qu’ils sont équipés pour gérer cette richesse. »

Ne soyez pas un professeur

La Fondation canadienne d’éducation économique (FCEE) fournit des ressources gratuites sur la littératie financière aux Canadiens de tous âges, y compris des ressources permettant aux parents de discuter d’argent avec leurs enfants. En 2018, l’organisation à but non lucratif a interrogé plus de 6 000 personnes — âgées de 12 à 17 ans — à travers le Canada et leur a demandé si elles souhaitaient apprendre des choses sur l’argent, et si oui, auprès de qui. 

D’après les résultats de l’enquête, Gary Rabbior, président de la FCEE, a déclaré qu’il était « évident que les jeunes souhaitent réellement en apprendre davantage sur l’argent » et qu’ils avaient diverses options pour se renseigner, telles que la télévision, les jeux et Internet. Cependant, la principale source choisie reste la maison, auprès de leurs parents.

« Ils apprennent tellement d’autres choses qu’ils se demandent pourquoi on ne leur enseigne rien sur ce sujet », a-t-il déclaré.

Mais Gary Rabbior insiste sur le fait que les parents doivent avoir des conversations sur l’argent avec leurs enfants d’une manière amusante et engageante, plutôt que d’essayer de faire de l’apprentissage dirigé avec eux comme le ferait un enseignant. 

« Essayer d’être un professeur […] rebute souvent les enfants », prévient-il.

Il suggère d’utiliser des exemples du monde réel, tels que l’achat d’articles ménagers de remplacement. En emmenant leurs enfants faire des courses, les parents peuvent comparer différents articles et expliquer à leurs enfants pourquoi ils coûtent aussi cher, en soulignant la main-d’œuvre et le processus de fabrication qui entrent en jeu dans chacun d’eux. 

Les parents peuvent ensuite engager une autre conversation sur ce que leurs enfants veulent faire pour vivre, en fonction de leurs loisirs et de leurs centres d’intérêt, suggère Gary Rabbior. 

« Vous pouvez prendre une petite chose comme ça et l’exploiter pour les aider à apprendre beaucoup de choses d’un seul coup sur les différents aspects de l’argent et de la valeur », soutient-il. 

Les parents dont les enfants adultes sont revenus vivre avec eux devraient profiter du temps supplémentaire qu’ils ont avec leur progéniture pour les guider dans leurs finances et leur carrière, affirme Gary Rabbior. Il fait remarquer que de nombreux jeunes Canadiens poursuivent des études postsecondaires sans se préoccuper de leurs perspectives de carrière et sans se demander si leur domaine d’études correspond à leurs passions, mais les parents peuvent les aider à s’orienter sur le marché du travail en constante évolution.

Encore une fois, il faut commencer tôt, « parce qu’il est plus facile de développer un comportement que de le modifier », souligne Gary Rabbior.

« Si vous parvenez à établir cette relation avec l’argent, elle peut s’avérer très utile plus tard, lorsque les enfants sont déjà suffisamment à l’aise pour venir vous voir s’ils ont un problème, s’ils ont commis une erreur ou s’ils ont une occasion, ajoute-t-il.

Pour les parents qui n’ont pas eux-mêmes de connaissances financières, Gary Rabbior indique qu’il existe de nombreuses ressources gratuites disponibles en ligne qui peuvent les aider à trouver leurs marques.

« Il existe toute une série de moyens permettant aux parents de se mettre rapidement au diapason et de se sentir assez intelligents lorsqu’il s’agit d’enseigner l’argent à leurs enfants, assure-t-il. Il n’y a pas grand-chose à faire. »

Voir l’article initialement publié sur le site conseiller.ca.